Références réglementaires
« L’accord du 13/07/2021 : L’impact du télétravail sur le collectif de travail et le télétravail comme levier de l’amélioration des pratiques managériales
6-1 La mise en œuvre du télétravail doit être prise en compte dans le fonctionnement du collectif de travail
La mise en place du télétravail, envisagée dans une approche organisationnelle, collective et « métier », permet de prendre en compte les impacts sur l’évolution des méthodes de travail et préparer la communication à destination du collectif sur ces impacts. Il convient d’être attentif à ce que le développement du télétravail ne soit pas source de difficultés et d’iniquité de traitement entre les agent·e·s qui peuvent en bénéficier et les autres. Il convient également de veiller à ce que le développement du télétravail ne soit pas source d’une distanciation sociale ou d’isolement accrus voire d’une perte de lien social entre des agent·e·s, leur collectif de travail et leurs encadrants. Dans cette perspective, il est recommandé la mise en place, dans le cadre du dialogue social, d’une phase d’expérimentation, associant l’ensemble de l’équipe. Celle-ci sera suivie d’un bilan, présenté dans les instances consultatives de nature à permettre d’identifier les facteurs clés de succès et de difficultés induites le cas échéant pour améliorer des conditions de travail au regard des spécificités du service.
Dans le cadre d’une démarche de qualité de vie au travail et d’amélioration des conditions de travail qui s’appuie notamment sur l’expression des agent·e·s sur leur travail (par exemple via la mise en place d’espaces de discussion), la mise en place du télétravail est l’opportunité pour l’encadrant d’associer les membres de son équipe à une réflexion collective sur l’adaptation et l’amélioration de l’organisation du travail. À cette fin, il appartient aux encadrants d’organiser régulièrement des échanges sur les modalités de mise en œuvre du travail sur site, du télétravail ainsi que sur les interactions rencontrées. Des espaces de discussion sur le travail peuvent aussi être organisés afin d’échanger sur le travail réel, son contenu et son organisation. Une formation à la conduite de ces espaces de dialogue leur sera proposée.
6-2 Le télétravail modifie l’exercice de la fonction managériale sur différents aspects, qui relèvent du domaine de l’organisation du travail.
Le management à distance nécessite une adaptation des pratiques managériales en fonction des missions et des spécificités de chaque versant. La déclinaison du présent accord pourra être accompagnée de guides et de différents supports pour aider les encadrants et les agent·e·s à s’approprier les nouveaux modes de fonctionnement issus d’une organisation hybride du travail. La DGAFP et la DITP pourront mettre à disposition des fiches pratiques notamment à destination des ministères.
• Passer à un travail en mode mixte, au bureau et à distance, est l’occasion de reconsidérer certains modes de fonctionnement.
Le télétravail comme le travail à distance remettent en cause certains modes de fonctionnement. Des étapes qui paraissaient évidentes semblent parfois redondantes, qu’il s’agisse de processus de décision ou d’organisation de l’activité. Une plus grande immédiateté, une simplification des process et une plus grande fluidité sont généralement attendues. L’allègement des procédures et des chaines hiérarchiques doit être recherché. L’utilisation d’outils numériques collaboratifs (réseau social interne, outil de gestion de projet) peut permettre de réduire le recours systématique au courrier électronique par exemple.
II appartient à l’encadrant, accompagné par son chef de service, de favoriser le dialogue avec son équipe sur les pratiques de télétravail et de faciliter l’articulation entre le télétravail et le travail sur site pour chacun des agent·e·s et au sein du collectif de travail. Le télétravail repose sur la relation de confiance entre l’encadrant et chaque agent·e en télétravail, qui se construit elle-même sur l’autonomie et le sens des responsabilités nécessaires au télétravail. La relation de confiance se construit aussi sur une organisation de travail concertée dont les modalités font l’objet d’un dialogue entre le personnel encadrant et les agent·e·s. Au-delà, il convient de partager avec l’équipe comment les objectifs de chacun s’intègrent dans l’objectif collectif, et de s’assurer que les moyens adéquats sont à disposition pour mener les activités individuelles et collectives.
• L’encadrant est également un des garants du maintien du lien social entre l’agent·e en télétravail et son service de rattachement.
Dans la limite de ses missions, l’encadrant a une responsabilité en tant qu’animateur d’un collectif et dans sa relation avec ses collaborateurs et son équipe. Chaque agent·e a également un rôle à jouer, en tant que membre de l’équipe et acteur de ses propres pratiques de travail, dans la limite de ses missions.
Tous les aspects de l’activité de l’équipe sont concernés et doivent être adaptés pour être soutenables : l’organisation du travail de l’équipe, la charge et la répartition du travail, les processus, le suivi et le pilotage de l’activité, l’animation du collectif, la communication et la circulation de l’information, la santé et les conditions de travail de tous (encadrant et agent·e·s),ou encore les relations managériales.
Ceci constitue parfois un changement culturel important qui implique que l’organisation et le collectif de travail soient accompagnés, notamment par la sensibilisation et la formation professionnelle. Une attention particulière sera portée aux encadrants en situation de travail complexe : primo-arrivants, télétravailleur·euse·s, responsables d’équipes fonctionnant en mode mixte (présentiel-distanciel) etc. Un accompagnement spécifique pourra leur être proposé.
Points de vigilance pour la négociation
L’Ugict-CGT promeut une conception du travail appuyée sur des organisations du travail respectueuses de la personne humaine. Elle défend une conception de l’encadrement et de l’expertise qui s’appuient sur des rapports sociaux constructifs et participatifs dans lesquels s’articulent l’individu et le collectif de travail.
Il est indéniable que la gestion des équipes et la gestion des projets ne sont pas les mêmes à distance. Un accord local sur le télétravail doit prendre en compte cette dimension compte tenu des risques de risques psycho-sociaux (RPS) et des ruptures potentielles dans la communication, l’augmentation de la charge de travail, le partage des informations et des décisions qui sont induites par la distanciation.
Le télétravail massif change le rapport au travail. Il y a un risque que le télétravail s’accompagne d’un renforcement des modes de management par objectifs, déconnecté du temps de travail et de la charge réelle pour les agent·e·s. Les encadrant·e·s peuvent se trouver pris dans l’injonction d’accompagner la mise en place de ces pratiques, le télétravail jouant le rôle de cheval de Troie. Il importe de faire valoir des modes de travail en équipe différents et faire que le télétravail permette un management alternatif (ugictcgt.fr/guide-management-distance).
« Manager le travail », c’est favoriser l’intégration effective du travail dans les modes d’organisations et le fonctionnement global. Il s’agit de s’interroger sur les actions et les organisations du travail qui sont favorables à l’exercice professionnel pour favoriser le développement humain durable. Ces propositions revendicatives ne sont pas exhaustives.
Ce qu’il reste à gagner
Espace, environnement et organisation du travail :
• Définir des espaces de discussion et les différentes formes de soutien aux équipes et entre agent·e·s (expert·e·s, cadres hiérarchiques, chef·fe·s de projets…) ;
• faire admettre que les cadres – d’encadrement et d’expertise – interviennent sur le contenu du travail et l’organisation du travail et fabriquent le travail au quotidien ;
• définir des plages horaires de déconnexion pendant le temps de télétravail, notamment lors des réunions. Au-delà des temps de pause identiques à ceux pratiqués en présentiel, au vu de la fatigue et risque professionnel dus notamment aux écrans, nous revendiquons un temps de pause, hors du poste de travail, toutes les deux heures en cas de télétravail.
Lien entre solutions organisationnelles et solutions numériques : inscrire le principe de délégation du travail, c’est-à-dire concevoir des solutions organisationnelles et numériques opérationnelles, en mettant la souplesse des organisations au service des cadres qui réalisent l’activité. Il s’agit bien de développer une gestion des organisations fondée sur l’intelligence collective, les organisations apprenantes et la formation dans lesquelles l’initiative et l’autonomie sont réelles.
Développer des relations humaines et la formation afin de répondre aux nouveaux besoins (rappelons toutefois que le télétravail n’a pas vocation à se mettre en place à 100 % et qu’il relève la plupart du temps de situations hybrides ou mixtes où cohabitent le travail « en présentiel » et le télétravail. Le télétravail doit rester une modalité complémentaire d’organisation du travail) :
• Instaurer un espace d’échanges physiques et non numériques avec son équipe, au moins une fois par semaine, pour faire le bilan et trouver des solutions aux difficultés organisationnelles, techniques et relationnelles (au sein de l’unité, service, direction ou avec les partenaires) ;
• inscrire la nécessité de maintenir régulièrement des relations humaines et de transmission des informations y compris transversales (compte rendu, ordre du jour, etc.) par tous les niveaux de la hiérarchie et par les cadres d’expertises transversales afin de promouvoir la participation et l’intelligence collective ;
• inscrire une formation adaptée au travail à distance sur deux axes principaux : l’utilisation des outils numériques et les évolutions des pratiques professionnelles.
La responsabilité sociale de l’encadrement implique qu’il puisse avoir, le cas échéant et au-delà de son rôle d’aide à la décision pour les cadres d’expertise notamment, un rôle de « lanceur d’alerte » et qu’il puisse être force de propositions dans la résolution de problèmes ou dans la prévention des risques psycho-sociaux liés au travail.
• Développer la qualité des relations professionnelles et la qualité du dialogue social en les fondant sur l’expression du travail et l’octroi de nouveaux moyens à l’encadrement de proximité (développer les temps de débriefing, droit à la déconnexion, prise compte des propositions d’une nouvelle organisation…)
• Négocier l’utilisation du réseau social (intranet) de l’employeur public qui autorise l’expression libre des échanges sur le fonctionnement du service, de la collectivité, en particulier, toutes les expressions émises à partir de l’éthique et de l’expertise professionnelle. Le réseau social n’a nullement vocation à remplacer les temps d’échanges en présentiel. Il s’ajoute comme une possibilité supplémentaire et pas en substitution.
• Garantir que le réseau social ne soit pas un moyen pour les directions de contrôler l’activité des cadres et qu’il ne serve pas de support à une quelconque évaluation professionnelle…
• Encourager les formes de soutien et intervenir sur le contenu et les organisations du travail.
• Développer un management fondé sur l’intelligence collective, les organisations du travail apprenantes et la formation.
• Favoriser l’expression de l’encadrement et des équipes sur leur travail, et accorder de nouveaux moyens au management de proximité avec le guide Ugict CGT « Quel management à l’ère du numérique ? » (ugictcgt.fr/guide-management-numerique) et avec le guide du Lanceur d’alerte (ugictcgt.fr/guide-alerte).
• Mettre en œuvre les mesures de protection des lanceurs d’alerte (application de la loi Sapin 2 (voir aussi guide Ugict-CGT sur les lanceurs d’alerte).
• Instituer l’échange de pratiques professionnelles entre services.